La ballade de la ballade ratée

Ce matin, le pays succombe sous la brume,
Un sale temps de vache, un temps où l’on s’enrhume.
Dans l’agenda de Claude est prévu le départ.
Partons, puisqu’il le faut, mais jamais au hasard.

Fonce à Fonsagrada, sur la route nouvelle.
Il est d’abord prévu la halte naturelle :
Promenade au grand air, forêt, chemin, torrent…
Comme quand j’étais jeune avec mes deux parents.

Queixeiro. Cascadas au fond de la vallée.
Le torrent nous emporte en sa joie en allée.
Un fort dénivelé nous mène au paradis ;
Le retour sera chaud comme en enfer, pardi !

Et dans ces moments-là, souvenirs de l’enfance,
Je me vois gambadant, embaumé de fragrance…
Cascades et ruisseaux, rencontres du matin,
Me font toujours penser à mon père Antonin.

Après cette ballade : achats de victuailles.
Fromage de brebis (y’a que cuilà qui m’aille),
Pêches, prunes, poivrons, pimientos de Padron,
La licor de hierbas, pour taper le carton…

Puis, chez Buenvenista, c’est l’achat de la viande :
Chorizo, boudins noirs, porco a l’ingrédiande…
Et pour finir, chez Dia, des yaourts et des vins,
Du pain, de la salade et des varios divins.

Point ne pique-niquons : il fait froid et la brume
Enveloppe les champs de sa triste amertume.
On rentre à la maison, d’hier manger les restes.
Le vin de la Mancha sonne jovial et leste.

Après le déjeuner : petite sieste intime.
Vers dix-sept heures, cap sur Grandas de Salime,
Visiter le musée ; cerrado le lundi !
On ne reviendra pas, ni mardi, ni jeudi.

Y’a d’la fouille à Castro, c’est d’la ruine romaine.
Cerrado le lundi ! Marie-Pierre a la haine.
Pour nous dédommager, -dessous de plats tout prêt-
Nous volons sans rougir une ardoise au muret.

Sur le bord d’une route et sans nulle barrière,
Nous avons contemplé des gravures sur pierre,
Un dodu tumulus, âgés de six mille ans.
On se dit, in petto, « Ces anciens, quel talent ! »

Heureux qui comme Claude a fait un beau voyage,
Et puis, est revenu dans son petit cottage
Pour faire le manger avec du morcillasse.
Ô Claude, quel dommage, il était dégueulasse.

Lundi 8 août 2005