par Anne BERTHOUX

SOMMAIRE

01 - COMPLEXITE ET AMBIVALENCE DE L'OURS
02 - MYTHOLOGIE 
03 - CHEZ LES ROMAINS
04 - DANS LA BIBLE
05 - DEPUIS LES TEMPS PREHISTORIQUES
06 - LOCALISATION
07 - LES GRANDES CARACTÉRISTIQUES DE L'OURS
08 - SES MOEURS ALIMENTAIRES
09 - LES FETES DE L'OURS
10 - PARENTE AVEC L'HOMME
11 - L'OURS EST VOYAGEUR
12 - L'OURS EST JOUEUR
13 - MONTREURS D'OURS
14 - REPRÉSENTATION DANS LA LITTÉRATURE
15 - DEVINETTES
16 - PROVERBES, DICTONS, EXPRESSIONS
17 - DIVERS

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L'ours est très présent dans la bande dessinée, mais je n'en parlerai pas vraiment sauf à citer le très américain Winnie l'ourson qui nous viendrait de Roosevelt. En 1902, lors d'une chasse il refusa de tuer un ourson noir attaché à un arbre qu'on lui proposait de tirer, la chasse ayant été infructueuse. Il s'y refusa donc disant qu'il ne pourrait plus regarder ses enfants dans les yeux s'il commettait un acte aussi lâche. La presse s'empara de l'événement puis un astucieux fabricant de jouets qui eut l'idée de reproduire des ours en peluche "teddy bear" par allusion au diminutif de Théodore.
L'ours est un animal éminemment chargé de symboles, ce qui en soi, le fait digne d'intérêt. Et sur le plan culinaire, certes l'intérêt n'est pas évident et je n'ai pu en déguster mais cela se pratique et j'ai quand même quelques recettes à vous proposer (rôti de fesse d'ours par exemple). Mais enfin je crois qu'il a largement prouvé qu'il était un gourmand si ce n'est un gourmet et en tant qu'omnivore aucun met ne lui est véritablement étranger pourvu qu'il le trouve dans la nature (encore que ! il goûte aussi des breuvages issus de la perversion des hommes - l'alcool- et que malheureusement pour lui, c'est pour sa perte). Donc nous tâcherons d'expérimenter culinairement une alimentation qui serait sans doute au goût des ours de par ses ingrédients -au plus près de la nature-, et de par ses accommodements, qui pour être des plus frustes ne risquent pas moins d'en être exquis, du moins je l'espère.

01- COMPLEXITE ET AMBIVALENCE DE L'OURS (retour au sommaire)

L'ours est un héros mythologique, un combattant valeureux et invincible, un rival sexuel, un fondateur de la race, un parent proche, juste un peu plus sauvage et plus poilu. Il est une figure paternelle, une bête féroce et un animal timide et solitaire. Il est une mère affectueuse et attentive, mais qui sait devenir violente et dangereuse pour protéger ses petits. Il est un saltimbanque dans les foires de village, il est le jouet le plus aimé au monde. (Giorgio Coppin)Sa ressemblance avec l'homme : à la différence de l'immense majorité des animaux l'ours est un plantigrade, c'est à dire qu'il pose sur le sol toute la plante du pied. Avec cette base d'appui plus grande (que les ongulés comme chiens, cheval, chat ou gazelle) il lui a été plus facile de se tenir debout et ainsi de se servir de ses pattes antérieures.
L'ours étant le seul animal supérieur qui hiberne, cette particularité fait de lui dans les mythes et croyances populaires un animal "cosmologique" lié au cycle du temps.Une légende Lapone postérieure à la christianisation explique ce sommeil hivernal :

Peu après la création du monde Dieu se promenait en Laponie. Il arriva devant un marécage si profond qu'il ne pouvait le franchir. Alors il appela le loup et lui demanda de le porter. Mais le loup répondit que cela ne le concernait pas, car il n'avait pas été créé par Dieu mais par le diable. (Les lapons considèrent en effet le loup comme un animal diabolique, ils l'appellent "chien du diable"). Dieu sollicita ensuite l'assistance du renne, qui prétexta qu'il avait trop à faire pour s'occuper de lui. Finalement l'ours s'avança spontanément et offrit son aide. Alors Dieu fit du loup un être hors-la-loi, toujours enclin au mal. Il fit du renne une bête toujours inquiète et insatisfaite, continuellement en train de travailler pour l'homme et de chercher sa nourriture. L'ours en revanche reçut comme récompense le privilège de dormir tranquillement pendant les mois les plus rudes de l'hiver.

C'est aussi un animal extraordinairement populaire, qui a donné son nom à de nombreuses localités,(Berne, en Suisse par exemple) dont la figure frappe de nombreuses armoiries et qui est donc très présent dans l'inconscient collectif. C'était, jusqu'à ce qu'on connaisse le lion, pour tous les peuples de l'hémisphère nord, le Roi des animaux. Le répertoires des dénominations qui lui sont affectées de par le monde est le plus impressionnant de tous les mammifères. Les Russes lui donnent un patronyme complet "Michel Ivanovitch", quant aux autres noms je ne vais pas les dévoiler maintenant parce que cela va faire l'objet d'une de nos activités de ce soir.

02- MYTHOLOGIE (retour au sommaire)

L'ourse dans les étoiles

* Le Mythe De Callisto

Ce mythe a été inventé pour expliquer les deux petites filles habillées en ourses qui apparaissaient dans la fête d'Artémis Brauronienne en Attique, ainsi que le rapport traditionnel qui existe entre Artémis et la Grande Ourse. Mais on peut supposer qu'il existe une autre version plus ancienne de ce mythe où Zeus aurait séduit Artémis bien qu'elle se fût transformée d'abord en ourse et qu'elle se fût enduit le visage avec de l'argile blanche dans l'espoir de lui échapper. Artémis était à l'origine maîtresse des étoiles mais elle perdit cette fonction au profit de Zeus.

* Artémis

Artémis, fille de Zeus et de Léto, soeur jumelle d'Apollon, déesse de la lune et de la chasse. Escortée de nymphes, munie d'arcs et de flèches, elle hante les bois la nuit à la poursuite de fauves. Vierge et chaste elle est vindicative et cruelle. On dit que c'est elle qui, courroucée par Agamemenon lui fait sacrifier Iphigénie. or d'autres disent que c'est justement au moment de l'expédition Grecque contre Troie, qu'Agamemenon s'apprêtait à sacrifier la plus belle de ses filles, Iphigénie, au sanctuaire de Brauronia afin que les vents soufflent favorablement., qu'Artémis enleva alors la jeune fille et la remplaça par une ourse. or il faut savoir que ce sanctuaire fut justement édifié pour apaiser Artémis dont ils avaient attisé la colère en tuant un ours. De très jeunes filles appelées ARKTOI (ourses en grec) y faisaient office de prêtresses. Tous les 5 ans, au printemps avait lieu une grande cérémonie au cours de laquelle une ourse était offerte à la déesse.
Artémis exigeait de ses compagnes une parfaite chasteté pareille à celle qu'elle pratiquait elle-même. Zeus ayant séduit l'une d'elle, Callisto, fille de Lycaon, Artémis s'aperçut qu'elle était enceinte. Elle la changea d'abord en ourse, appela sa meute, et Callisto aurait certainement été traquée et tuée par ses chiens de chasse si Zeus ne l'avait alors hissée dans le ciel. Par la suite il la fit figurer parmi les étoiles. Zeus les avait fait tourner autour de pôle afin de les avoir constamment sous les yeux pour les protéger puisque cette zone dans nos latitudes ne disparaît jamais. Mais selon certains c'est Zeus lui-même qui aurait changé Callisto en ourse et Héra, jalouse, aurait fait qu'Artémis la poursuivît par erreur à la chasse. Le fils de Callisto, Arcas, fut sauvé et devint l'ancêtre des Arcadiens.

Une autre version (B. Briais, F. Davot, Ours, Mythes et légendes) dit qu'Artémis avait appris que Callisto avait mis au monde en secret un enfant et que son père n'était autre que Zeus, le roi de l'Olympe.Héra l'ayant appris à son tour transforma Callisto en ourse, la condamnant ainsi à errer jusqu'à la fin de ses jours avec les fauves des montagnes...
Privé de sa mère, Arcas grandit malgré tout surveillé de loin par son père qui ne l'abandonnait pas. Devenu adolescent il voulut retrouver son grand-père, Lycaon qui le reçut à bras ouverts. Arcas enseigna aux sujets de Lycaon comment semer le blé, pétrir le pain et filer et tisser la laine. Puis il succéda à son grand-père et fit prospérer le pays. Parfois il allait à la chasse.
Et un matin, dans les montagnes de Grèce il suivait la piste d'une ourse. La bête curieusement, au lieu de s'enfuir semblait attendre le roi. C'était Callisto qui voulait contempler son fils. A un moment Arcas banda son arc, il allait lâcher sa flèche lorsque Zeus, devinant la tragédie qui se préparait, intervint. Il arrêta le bras du chasseur au dernier moment et transforma celui-ci en ours. Puis il transporta Arcas et sa mère, à nouveau réunis, dans le ciel où ils forment depuis les constellations de la Petite Ourse et de la Grande Ourse.

D'autres Légendes Grecques font aussi état d'enfants allaités et sauvés par des ourses, que ce soit Pâris, le fils du roi de Troie, Priam, abandonné à sa naissance sur le mont Ida, ou Atalante, laissée sur le mont Parthénon par son père qui désirait un garçon.* SymbolismePartout dans le monde l'ours symbolise la mort et la renaissance; cela se rapporte sans doute à son hibernation, l'ours semblant mourir chaque automne et renaître au printemps. Voilà pourquoi il figure dans beaucoup de rites initiatiques de puberté.
L'ours est supposé avoir des vertus thérapeutiques et médicinales (chez les Chinois c'est encore très en vigueur, Pline de son côté faisait état de la graisse d'ours comme remède contre la teigne et la chute des cheveux,; à partir de la viande d'ours on fabriquait en Chine des remèdes contre les rhumatismes, tandis que ses pattes servaient à confectionner des reconstituants, le fiel pour les dérangements intestinaux.

03- CHEZ LES ROMAINS (retour au sommaire)

A Rome, des ours provenant surtout de Germanie, étaient utilisés au cours des combats qui opposaient dans l'arène fauves et gladiateurs. L'empereur Caligula fit un jour combattre dans l'arène quatre cents ours contre des gros chiens et des gladiateurs. Gordien Ier apporta mille ours dans l'amphithéâtre.Ces ours étaient pour beaucoup importés des pays germains. Pétrone indique que les pattes d'ours constituaient un mets très recherché par les riches Romains.

04- DANS LA BIBLE (retour au sommaire)

L'ours n'est pas oublié dans les différents récits bibliques :
Ours : carnassier qui pénétrait dans les foyers et s'emparait des moutons (1 Samuel 17, 34-36) mais attaquait aussi les hommes (Amos 5, 19) et tuait (deux ourses déchirent 42 enfants (2 Roi 2, 24). On craignait qu'il fût à l'affût (Lamentations 3, 10), qu'il bondisse (Proverbes 28, 15). On redoutait son air sombre (Siracide 25, 17), ses grondements (Esaïe 59, 11). Mais c'était l'ourse à laquelle on avait enlevé ses petits qui était la plus dangereuse (brave et hargneuse : 2 Samuel 17, 8).Toutefois (Proverbe 17, 12) dit : «Mieux vaut tomber sur une ourse privée de ses petits que sur un sot en pleine folie». Au jour des comptes, Dieu attaquera ceux qui l'ont abandonné «comme une ourse à qui l'on a ravi ses petits...» (Osée 13, 8). Dans le royaume messianique, l'ours ne sera plus dangereux, «la vache et l'ourse auront même pâture, leurs petits, même gîte» (Esaïe 11, 7). La deuxième bête de Daniel 7, 5 est semblable à un ours et symbolise l'empire des Mèdes. Dans Apocalyspe 13, 1 et suiv., l'animal qui sort de l'eau a des pattes semblables à celles de l'ours, signe de son écrasante puissance. On mentionne également la constellation de (la grande) Ourse (Job 9, 9).

05- DEPUIS LES TEMPS PREHISTORIQUES (retour au sommaire)

Des restes fossilisés d'ours ont été retrouvés en très grand nombre, ils datent du Miocène, c'est à dire il y environ 25 millions d'années. apparemment les ours ont évolué à partir d'un groupe maintenant éteint de carnivores. Et depuis les temps les plus reculés l'ours a fasciné les hommes, inspirant à la fois crainte et respect. On retrouve sa silhouette gravée sur les parois des grottes préhistoriques. Ces représentations faisaient sans doute partie de rituels pratiqués avant la chasse. Cet "ours des cavernes" était beaucoup plus grand que les ours actuels et représentaient un grand danger pour les chasseurs seulement armés d'arcs et d'épieux. Ils utilisaient également des pièges et en particulier des fosses dans lesquelles ils les faisaient tomber. L'ours des cavernes disparut progressivement à la fin de l'époque paléolithique, au moment où le climat se réchauffait, laissant peu à peu la place à l'ours brun.

06- LOCALISATION DE L'OURS (retour au sommaire)

Les Espèces d'ursidésEn Europe subsiste l'ours brun (ursus arctos); En Amérique du Nord deux espèces : le grizzli (U. Arctos horribilis) et l'ours noir (U. americanus). Dans les régions boréales c'est l'ours blanc (Thalarctos maritimus). En Indomalaisie c'est l'ours malais (Helarctos malayanus) cependant qu'en Inde et à Ceylan on trouve l'ours lippu (Meleursus ursinus). L'ours à collier (Selenarctos thibetanus) se trouve dans les régions forestières du sud est asiatique, enfin l'ours à lunettes (Tremarctos ornatus) est l'unique représentant de cette famille en Amérique du Sud.Les plus gros effectifs se trouvent dans les montagnes d'Europe Centrale et Orientale  : Yougoslavie, Bulgarie, Hongrie, Roumanie, Tchécoslovaquie. Russie...
En Scandinavie, des mesures de protection sérieuses ont été prises et depuis le nombre des ours s'est sensiblement accru.La Norvège en compterait environ deux cents et la Suède six cents. En yougoslavie environ trois cents. La Roumanie est le pays d'Europe centrale le plus riche en ours : environ quatre mille. La Carélie, au nord ouest de de la Russie en possède environ trois mille. En Finlande la population ursine est évaluée à quatre cents.
En Europe occidentale, par contre l'ours a presque totalement disparu, à mesure que les vastes forêts qui lui servaient de refuge étaient défrichées. Quelques survivants, chaque année moins nombreux subsistent dans les Pyrénées, dans les monts Cantabriques en Espagne, dans les Abruzzes ou le Trentin en Italie.En FranceLes ours qui hantaient nos forêts au Moyen Age ont disparu au cours du XIX° siècle de la plupart de leurs derniers refuges : les massifs montagneux : Vosges et Massif central d'abord, Jura et Alpes ensuite. On ne trouve plus aujourd'hui que quelques rescapés dans les Pyrénées.
Bien que protégés par la loi depuis 1962, ces ours sont en grand danger. On en trouvait encore 300 à 400 en 1930 et aujourd'hui plus qu'une douzaine, ce qui ne permet pas une reproduction normale de l'espèce. Ils sont donc condamnés à l'extinction si aucune mesure efficace n'est prise pour les sauver.
Les ennemis de ces derniers grands fauves ne sont pas seulement les chasseurs, les braconniers ou les bergers, la principale cause de leur disparition reste le développement des activités liées au tourisme et aux sports d'hiver. La multiplication des routes, des sentiers, des remontées mécaniques, des stations ainsi que la réduction des zones forestières privent les ours de leurs derniers territoires. Il existe un projet de réintroduction de l'ours brun dans les alpes où le dernier a été tué en 1921.Autour de l'Arctique, l'ours blanc connaît lui aussi des menaces de par l'extension des activités humaines dans des zones jusque là désertes. Bien que le commerce de sa peau soit interdit ainsi que sa chasse réglementée, cela n'empêche pas des braconniers d'utiliser l'avion pour le poursuivre et l'abattre.
Dans la péninsule du Kamtchatka au nord est de la Sibérie existent des ours bruns similaires à ceux d'Europe, relativement petits. Mais on y aurait trouvé aussi les traces d'ours gigantesques. En Asie un autre ours brun de couleur rousse ressemblant beaucoup au grizzli américain vit dans l'Himalaya. Le petit ours brun de Mandchourie et l'ours-cheval du Tibet et de Chine forment deux variétés asiatiques de l'ours brun. L'ours-cheval est très redouté et fait des victimes parmi les fermiers vivant dans les montagnes du fait du défrichage intensif et des conflits territoriaux qui s'intensifient entre ours et humains.Au Japon il existe un Parc des Ours "Noboribetsu", dont la directrice, Noako Maeda, a selon l'ancienne coutume des peuples Ainu, allaité des oursons qui, selon ses dires tétaient avec plus de douceur que ses propres enfants. Elle souhaiterait développer l'élevage des ours dans le parc, pour les relâcher ensuite dans la nature. Mais les japonais considèrent les ours comme un véritable fléau. L'higuma, nom local de l'ours brun a traditionnellement sa tête mise à prix; 300 à 400 ours sont ainsi tués chaque année.Dans le sud de l'hémisphère Nord (car on ne trouve aucun ours en dessous de l'Equateur), en Afrique du nord on trouvait encore des ours dans les montagnes de l'Atlas mais ils ont probablement été exterminés par les Maures.
Pourquoi n'y a-t-il pas d'ours en Afrique ?
L'Afrique a été reliée à l'Eurasie pendant les temps géologiques modernes. Son écologie est très liée à celle des continents du Nord. Elle possède de nombreux animaux placentaires souvent très proches des espèces eurasiennes et occupant des niches écologiques identiques. Alors pourquoi pas d'ours ??? Des savants en sont venus à penser que c'est parce qu'ils ont évolué trop tardivement et que quand ils sont arrivés leur niche était déjà occupée. Alors par qui me direz-vous ? Eh bien la créature qui les a devancés descendait d'anciens insectivores qui avaient considérablement grandi et adopté des habitudes omnivores très proches de celles des ours. Cette espèce ressemblait beaucoup à un ours mais était bipède et avait perdu la majorité de son pelage, en un mot c'était L'HOMME, ce grand omnivore plantigrade. Ainsi il semblerait que nous devions notre évolution au fait que les ours furent trop lents à se propager au Sud de l'Equateur...Par contre en Amérique du Nord on estime leur population à quarante à cinquante mille individus. 90% se trouvent en Alaska, dans le Yukon, dans les Montagnes Rocheuses d'Alberta et de la Colombie britannique et dans la majeure partie des territoires du Nord Ouest. Les Etats-Unis en comptent moins de huit cents. Deux sous-espèces d'ours bruns seulement vivent en Amérique du Nord, l'une est le Grizzli, l'autre le Kodiak (du nom de l'île d'Alaska dont il est originaire). Les Américains ont pris le parti d'organiser des réserves d'ours dans de grands parcs nationaux ce qui a pour effet de rendre les ours très/trop familiers des humains.
Michel Praneuf parle d'ours "imprégnés et d'une certaine façon dénaturés et du coup assez dangereux. Ce sont les célèbres réserves de Mc Neil River (S.O d'Anchorage), le parc National de Katmai, le parc de Yellowstone. Les américains ont commis l'erreur de laisser les ours venir se nourrir dans les poubelles des hôtels. Vers 1930 c'était devenu une pratique courante dans ces parcs que de nourrir les ours de déchets, on en faisait même un spectacle très apprécié des touristes. En s'habituant à la promiscuité des hommes, les ours perdirent toute prudence, beaucoup apprirent à mendier de la nourriture auprès des touristes qui, les croyant apprivoisés, les traitaient comme leurs propres animaux domestiques.
Il s'en est suivi des accidents mortels, des morsures graves etc. Du coup on en est venu (en 1972) à clore les décharges et des centaines d'ours moururent car ne connaissant pas d'autres moyens de subsistance. Et maintenant certains chercheurs Américains dans le Montana essaient de créer expérimentalement chez ces animaux des comportements d'aversion à l'égard des hommes afin qu'ils apprennent à les éviter (huile pimentée, balles caoutchouc ...).

07- LES GRANDES CARACTÉRISTIQUES DE L'OURS (retour au sommaire)

Il a une intelligence très développée. Tout petit il reçoit de sa mère une éducation très attentive jusqu'à l'âge d'un an et demi environ si bien qu'il bénéficie d'un apprentissage efficace avant d'acquérir son indépendance totale, ce qui est assez rare chez les animaux.
Il est très habile pour se servir de ses pattes antérieures : il peut soulever des pierres et des branches, transporter des objets, pêcher, chasser, grimper aux arbres. Ses griffes puissantes lui permettent de s'agripper aux troncs d'arbres en toute sécurité et de creuser facilement le sol. Elle sont aussi de formidables armes offensives capables de tuer d'un seul coup des proies aussi grosses qu'un phoque, un sanglier ou un cerf.
De nombreux exemples rapportés par les zoologistes témoignent de son intelligence : ils ne sont pas curieux que pour se nourrir, ils explorent tout, remuent, retournent, tâtent, déchirent jusqu'à ce que "la chose" ait fini de bouger. Ils ont une excellente mémoire et se rendent régulièrement et au bon moment sur des lieux où l'expérience les a déjà amenés et où ils ont trouvé une nourriture à leur convenance. En Pennsylvanie un ours a fait la razzia d'un congélateur après en avoir ouvert la porte (qu'il n'a d'ailleurs pas refermée!) Dans un parc américain un ours avait trouvé le truc pour forcer les portes des WW : il enfonçait le toit et ainsi il pouvait chaparder le contenu. Il a ainsi enfoncé plein de voitures avant d'être identifié et capturé! Un autre a fait des kilomètres sur le versant d'une montagne pour seulement aller voir ce qui avait produit tant de bruit et de fumée : un volcan en éruption!!
Nombreux sont les ours qui ont su neutraliser les pièges en lâchant un gros rocher sur le dispositif et en s'emparant ensuite de l'appât!
Il ne "broute" pas comme une vache en arrachant des touffes d'herbes : il choisit les plantes qui lui conviennent et les cueille une à une avec son museau. Ainsi au sortir de l'hibernation il a besoin de se purger et c'est là qu'il consomme en quantité le nerprun ou bourdaine plante laxative.

Caractéristiques Physiques
Les ours sont des mammifères de grande taille, au corps massif caractérisé par la brièveté du cou et de la queue. Les griffes sont longues et non rétractiles . La morphologie spécifique de leurs molaires entraîne à les classer dans une famille à part de l'ordre des carnivores : celle des ursidés. Celle-ci renferme non seulement les ours (sept espèces actuelles) classées en deux genres : ursus (six espèces) et tremarctos , l'ours à lunettes (une seule), mais aussi leur cousin, le "grand Panda". Ce sont les grands carnivores actuels.La démarche des ourse, à la foulée courte a une allure habituellement lente. Mais il peut aussi, grâce à la puissance de ses muscles, pratiquer un "galop lent" atteignant une vitesse de pointe de 55/60 Km/h. Les ours sont de très bons grimpeurs, ce qui est en soi une prouesse pour des animaux aussi lourds.

La Reproduction
L'ours brun peut vivre plus de 30 ans et se reproduire pendant la majeure partie de sa vie.La durée de gestation est très courte : six à huit mois, est la même pour tous les ours. Les jeunes naissent à l'intérieur de la tanière presque sans poils, aveugles entre janvier et mars. Les portées sont en moyenne de deux. Le nouveau-né pèse moins d'une livre mais il grossit très vite grâce aux 33% de matières grasses contenues dans le lait maternel. Au cours de la croissance, le poids est multiplié par 1000.
Sur le plan de la reproduction les ours sont ce que les zoologistes appellent des "stratèges K" (par opposition aux animaux-proies qui eux produisent beaucoup de jeunes pour être sûrs qu'il en reste quelques uns, comme les lapins au taux de reproduction légendaire). Eux ne produisent que quelques individus mais les protègent et les nourrissent de façon qu'un fort pourcentage atteigne l'âge adulte. La première place dans cette catégorie revient à l'Homme. La deuxième place dépend du lieu : en Afrique et Asie orientale ce sont les grands singes; dans le reste du monde ce sont les ours.
Les ours ne naissent pas en sachant comment être un ours, chaque jeune doit apprendre a le devenir.
La mère est très attachée à ses oursons et elle les défend farouchement. Cependant 10 à 40% des jeunes meurent avant 18 mois. Ils sont souvent victimes d'ours mâles adultes qui peuvent parfois tuer la mère ou alors des loups aussi les dévorent.
Les oursons passent deux hivers dans la tanière de leur mère, qui les chasse au second printemps quand elle est à nouveau en oestrus. Elle peut avoir une portée tous les trois ans. Si elle ne s'est pas accouplée elle garde les jeunes un hiver supplémentaire. Après la séparation les mâles sortent du domaine de leur mère alors que les femelles tendent à y rester. Il se forme parfois des groupes sociaux composés de plusieurs femelles et de leurs jeunes qui s'occupent indifféremment des petits.
Pour témoigner de leur intelligence, les chasseurs esquimaux racontent que les ours polaires dissimulent leur nez noir sous leur patte blanche ou encore avec de la neige quand ils sont sur la glace à l'affût d'un phoque. On a vu aussi des ours utiliser des blocs de glace pour casser des igloos de phoques et s'emparer des petits. Charles Jonkel, auteur de nombreux travaux sur ces animaux, en a notamment observé un qui, après avoir poussé une grosse pierre sur une trentaine de mètres pour déclencher le mécanisme d'un piège, a pu ainsi tout à loisir se régaler ensuite de l'appât.
Ses techniques de chasse également témoignent de son intelligence (et aussi de sa force!) soit il attend très patiemment (ça peut durer une quinzaine d'heures) près du trou de respiration d'un phoque. Quand celui-ci montre son nez à la surface, l'ours aux aguets bondit et lui saisit la tête entre ses mâchoires. Alors avec une force incroyable il se redresse, tenant le phoque dans sa gueule et le secoue pour le faire passer par le trou. Un phoque adulte mesure environ 1m50 et pèse entre 40 et 110 kg. Le trou ne fait parfois qu'une trentaine de cm, tandis que le phoque peut être deux fois plus gros. Une fois extirpé il n'est plus qu'un amas d'os brisés et d'entrailles sanguinolentes.
Une autre technique consiste à s'approcher doucement d'un phoque au repos sur la glace, au bord de l'eau. Le phoque, quoiqu'endormi reste vigilant et toutes les 20 ou 30 secondes lève la tête, jette un regard et s'assoupit à nouveau quelques secondes. A chaque relâchement de la tête du phoque, l'ours s'avance de quelques centimètres, puis se fige instantanément quand elle se relève. L'approche se termine par un bond, l'ours déséquilibrant le phoque avant qu'il n'ait pu sauter dans l'eau.

La Défense contre le Froid
L'épaisseur du pelage, la formation d'une importante couche de graisse isolante à la fin de l'automne, quand ils peuvent encore se gaver de nourriture, ne suffisent pas pour maintenir leur température interne pendant les grands froids. C'est pourquoi ils se réfugient dans des tanières ou dans des trous où ils s'endorment. Ils restent sans manger ni boire, leur rythme cardiaque se ralentit, leur consommation en oxygène est réduite de moitié. Pendant ce jeûne qui peut durer de deux à sept mois selon les régions ils consomment leurs réserves de graisse mais leur température interne ne s'abaisse que de quelques degrés. La reprise d'activité au réveil est assez lente. Mais ce repos hivernal ne doit pas être confondu avec l'hibernation de certains petit mammifères, qui met en jeu des réactions métaboliques encore plus complexes.L'hibernation ou plutôt l'hivernage
Pendant cette période ils n'utilisent plus les protéines pour fabriquer leur énergie mais seulement les graisses. Ils n'urinent ni ne défèquent. Ils recyclent l'urée en muscles. Ce qui fait qu'à la sortie de l'hivernage ils sont plus musclés qu'au début bien qu'ayant perdu 20 à 40% de leur poids. Si on avait élucidé ce mystère on ferait fortune en appliquant cette technique pour les régimes amaigrissants ...
Durant cette période leur température reste proche de la normale ce qui leur permet le cas échéant de réagir s'ils sont dérangés, à la différence des autres animaux qui sont en véritables hibernation et qui ne peuvent que rester léthargiques si on les réveille.

Comportement Social
En dehors des périodes de reproduction les mâles vivent en solitaires. Par contre les femelles ont une vie familiale avec leurs oursons pendant plusieurs années et éventuellement avec d'autres femelles.

08- SES MOEURS ALIMENTAIRES (retour au sommaire)

Son alimentation est très diversifiée. L'ours brun est omnivore : il se nourrit indifféremment de la chair des proies qu'il capture, poissons, rongeurs, sangliers, chevreuils, lapins, vers, insectes ou de la chair des animaux morts qu'il trouve mais également de fruits, de baies, d'herbes, de racines et naturellement de miel.
Cette aptitude à se nourrir de tout est liée à la puissance de ses muscles masticateurs et au développement de ses molaires; l'ensemble constitue un appareil plutôt apte à broyer n'importe quel type d'aliments durs, comme les os, qu'à dilacérer les chairs. Selon les saisons et les milieux, tubercules et racines, lambeaux d'écorce arrachés aux troncs, herbes diverses, fruits de la forêt, baies charnues, faînes (fruits du hêtre) et glands, aisément manipulés grâce à la souplesse des poignets et des phalanges griffues.
L'ours blanc, étant donné le climat des régions arctiques dans lesquelles il vit, est un formidable chasseur à l'alimentation essentiellement carnivore, à base surtout de chair fraîche, bien qu'il se nourrisse parfois aussi de chair d'animaux morts et ne dédaigne pas au besoin de manger des herbes et des racines. L'estomac des adultes, énorme, peut contenir 70kg de nourriture, le tractus digestif, typique d'un carnivore, n'est pas adapté à la digestion des féculents (Sorry Mister Parmentier!).Le foie de l'ours polaire est très riche en vitamines a, ce qui le rend toxique pour l'homme.

Quelles Plantes ?

L'herbe à ours : bardane (en grec arkoudovotano de arkouta :ours)
Smilacées à baies (du grec arkoudavatos)
L'ail d'ours : lycopode (All. Bärlapp. Latin : allium ursinum)
Baies des ours : mûres (suédois björnbär)
Raisins d'ours : arbouses ou busseroles (latin uva ursi; grec : arktosaphylos)
Muguette ou génotte : ombellifère tubéreuse Conopium majus 
Salsepareille : plante grimpante et très envahissante dont raffolent les Shtroumpfs
Nerprun ou bourdaine : plante laxative

09- LES FETES DE L'OURS CHEZ NOUS(retour au sommaire)

Le carnaval des Pyrénées
Dans de nombreux villages des pyrénées se déroulaient vers la fin de l'hiver, des carnavals dont l'ours constituait l'acteur essentiel. Le plus célèbre avait lieu à Prats de Mollo. D'un endroit à l'autre on retrouvait des éléments communs : le rôle de l'animal était tenu par un homme masqué, recouvert de peau d'ours. Faisant irruption au milieu de la foule, il assaillait les hommes et surtout les femmes dont il simulait l'enlèvement. A la fin les chasseurs capturaient l'animal et le promenaient en triomphe. Dans certains cas l'ours ressuscitait et participait aux danses. A Prats de Mollo la "bête" était finalement rasée par le barbier, ce qui laissait apparaître encore plus nettement la parenté entre les ours et les humains.
La proximité entre l'ours et l'homme est elle aussi universelle et du coup les différentes histoires de métamorphoses d'hommes en ours et inversement. Un des principaux héros de la mythologie Coréenne, Tan Gun, est le fils d'une femme qui était autrefois un ours et que le dieu Ung a transformé en être humain. Dans la légende Anglo-saxonne de la Table Ronde, le principal protagoniste est rattaché aux ours jusque par son nom "Arthur", dérivé en droite ligne du grec "arktos". Pour les Indiens d'Amérique, l'ours était un animal totem, c'est à dire le fondateur de la race; on l'appelait GrandPère et on le traitait avec un profond respect même quand on le chassait pour le tuer. Certaines tribus, après l'avoir abattu, lui faisaient d'ailleurs "fumer" le calumet de la paix pour s'assurer de son pardon et de son amitié.
En somme même si les détails varient suivant les civilisations, il est une croyance profondément enracinée dans les cultures anciennes et donc profondément dans la culture de chacun d'entre nous :
Sous la peau de chaque ours il y a un homme, et il fut un temps où l'ours était un être humain!! Georgio Coppin.CHEZ LES ESQUIMAUXPour les peuples du Grand Nord eurasiatique (les Lapons, les Sibériens) l'ours brun n'était pas un animal comme les autres; sa chasse nécessitait de multiples précautions afin d'éviter la colère de l'animal et, pensait-on, sa vengeance après sa mort. Tout d'abord ils croyaient que l'ours entendait de très loin et même dans son sommeil, les paroles des hommes. Aussi évitaient-ils de prononcer son nom, c'est pourquoi on trouve tant de périphrases pour le désigner. Pour parler de leurs projets de chasse certains ne parlaient même que par gestes (Tatars).
Les femmes étaient totalement tenues à l'écart au retour de la chasse de peur qu'elles repartent avec lui ??
Une fois le festin terminé les os de l'ours étaient soigneusement récupérés et enterrés. Au bout de trois jours, durée de deuil dans ces régions, les chasseurs se purifiaient avec les cendres.
Chez les Esquimaux du Groenland on retrouve des rites de chasse similaire avec l'ours blanc. Le chasseur veille avant tout à ne pas offenser l'âme de sa victime. Il reçoit sa dépouille comme il accueillerait un hôte et la traite avec un maximum d'égards. On lui offre à boire, des cadeaux (les semelles de bottes), pour le distraire on lui raconte des histoires ... L'esquimau pense que l'ours gardera un tel souvenir de son séjour parmi les hommes qu'il le répétera et que d'autres ours viendront, volontairement se faire tuer pour recevoir eux aussi de tels honneurs !

10- PARENTÉ AVEC L'HOMME (retour au sommaire)

Caractéristique
Les Américains, outre les Teddy Bear et Winnie l'ourson ont probablement largement contribué à la récente popularité des ours. Ils avaient choisi durant la dernière guerre mondiale comme symbole de la prévention des incendies un ours baptisé "Smokey". Cette campagne dure toujours et remporte beaucoup de succès.

Parenté physique
Outre la station debout et les pieds plats, les éthologistes présentent un grand nombre de caractères infantiles qui les rapprochent des petits d'hommes : extrémités courtes et dodues, front bombé et convexe, le crâne gros et rond, les joues pleines, la forme du corps moelleuse et ronde, le pelage doux (un berger pyrénéen dit qu'une touffe de poils d'ours qu'il a trouvée était étonnamment douce, plutôt comme des cheveux que comme des poils), et puis sa démarche un peu lente et pataude. Chez le petit d'ours ces traits sont encore plus accentués que chez l'ours adulte évidemment.

Parenté comportementale
L'ours est un animal extrêmement intelligent, notamment capable d'adapter son comportement à ses conditions de vie et à ce qui survient dans sa vie. Ainsi dans Ours du Monde on rapporte une anecdote survenue au naturaliste McLellan : une ourse grizzli capturée en 1979, appelée Blanche, était très affolée et agressive, labourant le sol et chargeant tout en grondant car l'un de ses pieds avait été blessé par un piège. Rien ne pouvait la calmer.Ensuite elle devin une excellente informatrice grâce à son collier émetteur et on pu la localiser six cents fois. Au bout de deux ans il fut décidé de la capturer à nouveau pour changer son collier dont la batterie se déchargeait. Après avoir déjoué toutes sortes de pièges elle fut prise grâce à un daim tué sur la route utilisé comme appât .
"Assise à l'emplacement du piège elle n'avait même pas cherché à tirer sur le câble qui entourait sa cheville et elle attendait docilement en nous regardant. Cependant elle avait eu soin, avant de s'asseoir, de creuser un trou dans le sol, peut-être afin de protéger son arrière-train d'une éventuelle fléchette emplie de tranquillisant. Elle se souvenait certainement de sa capture trois ans auparavant. Aussi je lui envoyais la fléchette dans le cou. L'expression de son regard semblait dire "vous êtes ignobles, ce n'est pas bien." Il y a plusieurs années que je n'ai pas revu Blanche, elle devrait avoir maintenant vingt sept ans environ. C'était une ourse brillante!"

11- C'EST UN VOYAGEUR (retour au sommaire)

Les ours peuvent être sur des surfaces de 50 000 km2 dans une même année (ours polaires). Un ours marqué a été tué l'année suivante à 3218 km de l'endroit où il avait été lâché. Le domaine des ours polaires représente une étendue de près de 13 millions de km2 de terres glacées et de banquise. On a longtemps cru, à tort, que ces plantigrades voyageaient sans cesse d'un continent à l'autre. C'est pour cette raison que les esquimaux les nommaient "philoqahiaq" : éternels errants
Odorat : Il a un odorat très développé, peut sentir des choses enfouies à 30cm sous le sol.
Vision : En se dressant sur ses pattes de derrière il augmente considérablement sa distance de vision : il peut voir un objet ou un animal à plus d'un km de distance.

12- C'EST UN GRAND JOUEUR (retour au sommaire)

Un ours polaire qui a envie de jouer approche avec douceur un autre mâle à sa convenance et les deux entament un lent et pesant menuet. Ils tournoient, reniflent, tête baissée, bouches fermées, leurs regards détournés, signifiant ainsi que leurs intentions sont pacifiques. Ils "s'embrassent" la bouche grande ouverte, et se mordillent le cou. L'un d'eux pose alors une patte sur l'épaule de l'autre, et se redressant ils perdent l'équilibre, s'étreignent, se boxent, se repoussent, se balancent et luttent. Quand l'un culbute et se couche ses énormes pattes tournoyant dans l'air, l'autre, bouche ouverte, se jette sur lui, et ils s'ébattent sur le sol avant de se relever pour lutter encore. Conscients de leur force ils semblent faire attention à ne pas se faire mal. Chaque assaut dure une quinzaine de minutes. Vers la fin les combattants sont si essoufflés qu'on peut les entendre à une centaine de mètres. Echauffés et exténués ils se séparent, s'allongent sur le sol glacé, avalent de la neige pour se refroidir puis se reposent un peu.
C'est sans doute cette parenté avec l'homme qui a donné lieu à la curieuse tradition, venue des Tziganes, des montreurs d'ours.

13- LES MONTREURS D'OURS (retour au sommaire)

Cette pratique a été reprise par les habitants des vallées de Salat et de Bethmale. les dresseurs constituaient une confrérie dans la vallée du Salat et du Garbet en Ariège. Les montagnards ariégeois ont appris cet "art" au XIX° siècle des ursari les Tsiganes nomades venus des Carpathes roumaines où cette corporation des montreurs subsiste encore.
Il fallait abattre la mère et s'emparer des oursons pour procéder ensuite au dressage. On attachait d'abord les oursons dans les maisons près du foyer avec les chiens dont ils partageaient les jeux et la nourriture, on leur donnait des noms familiers, Martin Dominique ...
On raconte qu'à Sarrance des hommes avaient emmené un ourson dans le village. La nuit venue, la mère, qui flairait sous chaque porte pour le chercher, le trouva dans une maison, défonça la porte et entra. Sous les yeux de l'habitant effrayé, l'ourson repartit en suivant sa mère.
Les dresseurs utilisaient l'intelligence de l'animal et son aptitude à se tenir debout pour lui faire exécuter des pas de danse, des saluts, simuler un combat et faire le mort. Ils prenaient un vieil ours rompu à toutes les "ficelles du métier" pour qu'il enseigne par imitation ses tours aux jeunes ours. Il fallait douze à quinze mois de dressage. Et les méthodes n'étaient pas tendres. On touchait vraiment à la barbarie quand il s'agissait, une fois les classes terminées, de procéder à la "ferrade", la cérémonie qui permettrait de sceller un anneau métallique dans le museau de l'ours auquel serait fixée la chaîne qui le tiendrait en laisse.

14- REPRÉSENTATION DANS lA LITTÉRATURE (retour au sommaire)

Commençons par Pline qui dans son histoire naturelle raconte, ce qui est faux, que les ours s'accoupleraient ventre contre ventre, à la manière des humains... (Histoire Naturelle, Livre VII, 54 et XXXII, 10), mais il parle aussi, nous l'avons déjà vu des vertus médicinales de l'ours.
Au moyen Age, dans les récits merveilleux ou les chansons de geste, l'ours apparaît à côté des lions et des dragons que doivent affronter de vaillants chevaliers.
Les contes populaires européens quant à eux dénoncent la gourmandise de l'ours. Dans le Roman de Renart, Brun l'ours est un personnage benêt et glouton à qui le goût immodéré du miel fait perdre la raison.
Les fables aussi mettent souvent en scène des ours. La Fontaine, dans L'ours et l'amateur de jardins, dénonce la stupidité d'un ours qui, pour chasser une mouche posée sur le nez de son ami, lui lance un lourd pavé sur la tête. Dans La lionne et l'ours, il le présente comme un animal redouté. Seule l'ourse ose faire des remontrances à la lionne qui importune les autres animaux de la forêt. Dans L'ours et les deux compagnons, le fauve est considéré comme un gibier dangereux à chasser. Il est encore question de l'ours dans Les frelons et les mouches à miel, et L'ours et les deux compagnons donne lieu à ce fameux dicton "il ne faut jamais vendre la peau de l'ours qu'on ne l'ait mis par terre".
Marie de France dans la fable 51 "Le singe et ses enfants" évoque une singesse qui est si fière de son petit qu'elle le montre à tous les animaux , au lion qui le trouve affreux puis à l'ours qui le déclare beau et gentil, le prend pour l'embrasser et le mange!!
Dans le Roman de Renart l'histoire du loup Isengrin qui se fait couper la queue prise dans la glace est la même que les Lapons racontent eux à propos de l'ours.
Plus proche de nous, une romancière Canadienne, Antonine Maillet, a écrit un truculent récit qui met en scène une famille d'ours et une famille de fermiers canadiens dont les histoires se confondent : L'oursiade.
Dino Buzzati : Le jour où les ours ont envahi la Sicile, très drôle. Anton Tchékov : L'ours (pièce courte).

15- DEVINETTES (retour au sommaire)

Pourquoi si un ours voit deux frères il ne les attaque pas ?
Parce qu'il sait qu'un homme se bat jusqu'à la mort pour défendre son frère.

Que signifie le prénom BERNARD ?
D'origine germanique signifie fort comme un ours Bern -hard.

Qu'est-ce qui se passe le jour de l'ours ?
Jour de la Chandeleur chez les germaniques et espagnols ou français; 25 février chez les scandinaves..Mais dans tous les cas il s'agit du jour où il se réveille et décide ou non de sortir de son hibernation ou de se "retourner sur l'autre flanc"

.Que signifie de rester couché sur une peau d' ours ? (Expression allemande)
Etre fainéant, bon à rien ("Bärenhauter" --> auf der Bärenhaut liegen)

Pourquoi l'ours ne sort-il qu'à la nouvelle lune ?
Pourquoi se rendort il pour une période de quarante jours et non pas seulement jusqu'à la prochaine nouvelle lune qui suit la pleine lune de deux semaines ?

C'est que l'unité de mesure du temps correspondait souvent à une lunaison et demi; période pour l'accomplissement d'une épreuve d'un événement, d'une maturation. C'est très net dans les récits bibliques (exemple la durée du Déluge qui est de 40 jours), dans la segmentation de l'année chez les Celtes.

Que fête-t-on le 3 Février, fête de la Saint Blaise, c'est à dire le lendemain du réveil de l'ours ?
En Saône et Loire, à Berzé, cette fête revêt une importance particulière. S'y tenait la foire aux bestiaux (il passait pour être le protecteur du bétail).

Pourquoi était-il fréquent qu'un ourson s'ajoute à la dot d'une fille à marier ?
Région de Couserans, Vallée de Salat.
Parce qu'ainsi la carrière de montreur d'ours du futur gendre serait assurée.

A quoi servait l'école des Ours du village d'Ercé (Ariège) ?
C'était une école de montreurs d'ours. Les ariégeois avait appris cet art des "ursari", tziganes nomades veant des Carpathes Roumaines où cette corporation existe encore. Chez nous cela a disparu avec la guerre de 14.

Pourquoi appelle-t-on "ours" la liste des participants d'un journal, son label de fabrication mentionnant les noms de l'limprimeur et du directeur de la publication notamment ?
C'est par comparaison avec l'allure de l'animal en train de danser (chez les montreurs d'ours, il dansait debout avec un baton placé en travers de ses épaules et sur lequel reposent ses deux pattes antérieures) qu'on a donné ce surnom d'ours aux ouvriers typographes qui maniaient la presse à bras. L'ours est ainsi devenu la marque du syndicat des typographes.

Pourquoi appelait-on souvent les ours Martin ?
Mestre Martî au pès descaus (Région du Couserans) = Maître Martin aux pieds nus
Sans doute donnait-on ce nom de Martin par allusion au saint qui avit fait don de son manteau à un pauvre comme l'ours "donne" sa fourrure.

Que peut signifier OURSON quand il ne s'agit pas du petit de l'ourse ?
Les poils du pubis. "Dans mon ourson couleur d'ébène sans façon il glisse la main". Lanjon 1896 cité par Guiraud.

En quoi consiste la pratique du "paiement à l'ours" ? Finlande
Lors de la moisson on sacrifiait le premier agneau de l'année, son sang coulant par terre et ses entrailles étaient données comme paiement à l'ours envers qui on se sentait redevable de la récolte.
De même dans les pays germaniques la dénomination d'ours de paille désignait la personnifiaction de l'esprit de la végétation qui préside à la croissance des céréales. On luifaisait des sacrifices.

Que signifie l'ours quand il s'agit des traditions autour des moissons en Allemagne ?
On appelait ours la dernière gerbe qu'une jeune fille prenait alors dans ses bras en simulant une danse avec un cavalier. Une autre coutume allemande consistait pour le moissonneur à qui il échoit de faucher les derniers épis à s'habiller de paille et à prendre place sur la dernière charretée de blé, parfois avec une "compagne-ourse".

Pourquoi l'ours se frotte-t-il aux arbres après les avoir griffés (notamment les épicéas) ?
C'est pour en faire sortir la résine et ensuite y coller ses poils quand il mue; il accélère ainsi le processus de la mue.

16- PROVERBES, DICTONS, EXPRESSIONS (retour au sommaire)

 Ne pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué. Chez nos voisins :- Le marchandage au marché et l'ours dans la forêt - Roumanie
- L'ours est encore dans la forêt et ils marchandent la peau - Pologne
- Verkaufe nicht die Haut, ehe der Bär gefangen - Allemagne
- Non vender la piel del oso antes de haberlo matado Espagne
- Non vendere la pelle dell'orso prima di averlo ucciso - Italie
- Mieux vaut un moineau dans la main qu'un ours dans la forêt - Laponie* Si un ours grogne en voyant une femme c'est qu'elle n'est plus vierge - Poméranie* Tout bon chien sait que l'ours est gaucher (J. Malaurie, "Les rois de Thulé")* Il est poli comme une queue d'ours (personnage très grossier)* Ours à jeun ne danse pas (Grèce = Ventre affamé n'a point d'oreille)* Avoir une tête d'ours c'est avoir un caractère impossible.* Tirer la barbe de l'ours qui est une expression allemande : Bärenreisser, cela veut dire être vantard. Mais, mesdames, méfiez-vous si un homme cherche à vous tirer les poils de votre ourson car, ici ourson signifie pubis.* En Espagne, faire l'ours, hacer el oso, signifie courtiser une belle ou une moche mais c'est plus rare, surtout si elle a ses ours. Avoir les ours c'est avoir ses règles (interprétation populaire de l'occitan "aver las oras" = avoir les périodes)* A la courtille où le beau sexe abonde, j'étais allé dans l'intention d'ourser (Dumoulin 19ème).Traduction : En boite où y'a des meufs, j'y suis allé pour baiser grave. Ourser veut dire coïter ou encore faire la cour à une femme mais d'une manière brutale, comme un ours.

* Si un ours te terrasse, appelle-le Grand-Père (Géorgie du Caucase)
Flatte l'ours pour t'en sortir.

 

17- DIVERS (retour au sommaire)

* Légende Tsigane à l'origine des Ursari

Un jour, une jeune fille se trouva enceinte sans avoir jamais eu de rapports sexuels. De honte elle avait résolu de se jeter dans la rivière. Mais l'eau se retirait au fur et à mesure qu'elle avançait. Un homme sortit de la rivière et lui dit : "N'aie pas honte, car tu donneras naissance à un animal capable de travailler comme un homme." Rentrée chez elle, la vierge accoucha d'un ourson. Quand il grandit les Tsiganes lui apprierent à danser et à faire des tours amusants. Et depuis lors, les nomades parcourent le monde en compagnie d'ours, saltimbanques comme eux. Ils sont à l'origine du groupe des montreurs d'ours.* Sculptures, peinturesUn tableau de Rubens figure Artémis et Callisto nue. Artémis penchée sur Callisto semble l'interroger en prenant son visage dans sa main.
Un autre tableau de Schiavone (musée de Picardie, Amiens) représente Diane et Callisto. Diane est le nom Romain d'Artémis.

* Livres pour enfants

Ma fille Cécile tient à ce que je cite un monument de la littérature de jeunesse Mais je suis un ours de Franck Tashlin, scénariste de W. Disney et Laurel & Hardy, grand inspirateur de Jerry Lewis, qui raconte l'histoire d'un ours confronté à une usine qui s'est construite autour de sa grotte pendant qu'il hibernait. Personne ne veut croire qu'il est un ours, tout le monde le traite d'imbécile mal rasé vêtu d'un manteau de fourrure. Il finit par y croire lui-même et se retrouve très malheureux à travailler à la chaîne à l'usine.
On se doit de parler d'un des tout premiers ouvrages de littérature de jeunesse, anglais, Winnie l'ourson, (1928) de Alan Alexander MILNE, et illustrés par SHEPARD (et plus tard repris en l'édulcorant, comme à l'accoutumée par Walt Disney). Il s'agit d'une préfiguartion de Calvin et son tigre Hobbes (dont nous a entretenu qui vous savez) dans la mesure où le héros est un jouet en peluche qui parle et à qui arrivent des aventures tant ursines qu'anthropomorphiques ! Il y a aussi Petit ours brun et les diverses aventures d'un bébé ours de Grégoire Solotareff. Il ne faut pas oublier, bien sûr, le très bel album de SAMIVEL intitulé Brun l'Ours (aux éditions Delagrave).

* Contes

De nombreux contes évoquent des histoires de femmes enlevées par des ours. La légende de Jean de l'ours, mi-homme, mi-bête, se retrouve avec de multiples variantes à travers toute l'Europe.
Des récits chrétiens assimilent l'ours au diable. Terrassé par un saint, le fauve devient alors d'une dociclité exemplaire. Dans l'Ariège, un ours avait dévoré l'âne qui portait la besace de l'évêque deSt Lizier, Valérius. Furieux, celui-ci contraignit alors le fauve à remplacer sa victime et à porter désormais ses bagages sur son dos !

* Chansons

L'ours est aussi présent dans la chanson. On trouve le jeu chanté : Monsieur l'ours réveille toi... et L'ours, une chanson chantée par Charles Trénet. Mais notre président à lui-même mis en musique un poème de R. Desnos : La Grande Ourse. Et JAL a dessiné une histoire intitulée : La chasse au grizzli.

* Légendes celtes

Vers la même époque les Celtes vénéraient la déesse-ours Artio. A Berne est conservée une statue gallo-romaine que les Helvètes avaient dédié à Artio. Elle représente une femme assise; sous un arbre un ours lui fait face; près d'elle se trouve une coupe de fruits. Il doit s'agir d'une déesse mère de la nature - de la végétation et du gibier-, peut-être invoquée par les chasseurs comme protectrice des ours. La seule autre image connue d'Artio se trouve sur une monnaie de bronze et représente la déesse dévorée par un ours. On trouve dans la littérature celtique de nombreux patronymes ursins. Et en particulier le légendaire Roi Arthur, roi de Bretagne insulaire qui combattit les envahisseurs saxons au VI° siècle, et que sa réputation de force et d'acharnement ont fait assimiler au dieu-ours.

* Etymologie

Du coup faisons un peu d'étymologie et nous n'en parlerons plus. Du grec Arctos (ours) nous vient Artique : cet adjectif nous vient de l'astronomie par référence à la Petite et à la Grande Ourse. Par la suite on a formé un substantif pour désigner la partie du globe placée sous ces constellations. Les septs étoiles (ou sept boeufs) de la Petite ou de la Grande Ourse, appelées Septentriones en latin ont donné septentrional synonyme de boréal qui vient de boréas, vent du nord en grec.

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